Archives de catégorie : Mise en scène

Gardez votre calme!

Par Karen Dickson

Je pense qu’un des secrets pour garder son calme consiste à se « dissocier » comme metteur en scène : quand on travaille avec des comédiens, on se concentre sur eux – pas sur l’éclairage, les accessoires ou les décors, ni sur la myriade d’autres détails qui pourraient causer beaucoup de stress!

Je tiens à me rappeler que, en tant que metteure en scène, mon mandat se termine après la générale. Je dois donner à mes comédiens tout ce dont ils ont besoin jusque-là – sinon je ne leur rends pas service! C’est important qu’ils sachent que j’ai confiance en eux. Bien entendu, cette confiance découle du fait que nous avons travaillé fort et que je leur ai beaucoup demandé pendant les répétitions. Je m’efforce d’ailleurs de rassurer mes comédiens : je ne les laisserai se rendre à la représentation que si je sens qu’ils sont prêts. Et si cela signifie des heures de boulot supplémentaires, eh bien! nous y mettrons le temps qu’il faut.

À la fin de la générale, je cherche à clore nos semaines de préparation d’une manière constructive. S’il reste quelques lacunes, je trouverai une façon positive d’influencer les acteurs en les encourageant à faire de leur mieux et à jouer de tout leur coeur, avec l’aide incommensurable de Dieu.

Je crois que les metteurs en scène ont la responsabilité de « bâtir » les comédiens, de les édifier, et non de les démolir. À mon avis, nous pouvons contribuer à édifier notre troupe en demeurant nous-mêmes motivés et calmes… Pleins d’énergie, oui, mais agités et énervés, non.

Les comédiens doivent avoir la conviction que nous comptons sur Dieu pour tous nos besoins de théâtre. Il vaut toujours mieux suivre la direction qu’il nous donne : c’est la meilleure. Quand Dieu est à la tête du projet, qui sommes-nous pour paniquer ou nous emporter?

Voir aussi:
Hey! Relaxe!


Extrait de DramaShare Organizational Manual, publié par DramaShare (2000). Traduit et adapté par Chantal Bilodeau-Legendre, avec l’aimable autorisation de DramaShare.

 

Le schéma actanciel

Par Lorraine Hamilton et Chantal Bilodeau-Legendre

D’abord, ça sert à quoi?

Le schéma actantiel précise les relations qui existent entre les personnages d’un récit. On peut analyser les œuvres théâtrales, aussi bien que les romans par exemple, au moyen du schéma actantiel. On y voit si la situation est équilibrée et si tous les éléments de la narration y sont présents. Qui est le personnage principal? Quel but poursuit-il? Quels facteurs le poussent vers son but? Qu’est-ce qui lui vient en en aide? Qu’est-ce qui lui nuit?

Actantiel1

Euh… c’est quoi tout ça?

Le sujet correspond au personnage dont on fait l’étude. Il a nécessairement une quête personnelle rattachée à son rôle dans la pièce, sinon il ne servirait à rien dans l’histoire.

L’objet a ici le sens d’objectif. Il n’y aurait pas d’histoire intéressante si le sujet réussissait à obtenir immédiatement son objet. Pour cette raison, il se heurte à divers obstacles durant sa quête. Tout ce qui s’oppose à son projet est un opposant; tout ce qui l’aide à le réaliser est un adjuvant. Plusieurs opposants et adjuvants sont possibles. Ce peuvent être des personnages, des choses ou des événements.

Le destinateur est ce qui motive le sujet à entreprendre sa quête. Le destinateur est souvent l’actant le plus difficile à trouver. Il peut s’agir d’une personne ou d’une force morale qui provoque ou mandate la quête. On réussit à l’identifier en posant la question « Pour qui… (ou pour quoi) le sujet entreprend-il sa quête? ».

Quant au destinataire, il s’agit de la personne à qui profitera la quête. On se demande alors « À qui l’aboutissement de la quête servira-t-il? »

Deux illustrations

Un conte…

À la demande du roi (destinateur), le preux chevalier (sujet) veut délivrer (quête) la princesse (destinataire). (Mais il est possible que le destinataire soit aussi le roi, qui veut récupérer sa fille, ou même le chevalier, qui veut l’épouser!) Le chevalier doit d’abord affronter le dragon féroce (opposant) qui garde le château ainsi que la méchante sorcière (opposant) qui a ensorcelé la tour. Heureusement, grâce à sa fidèle épée magique et à la fée Mélusine (adjuvants), il parviendra à libérer la belle.

Un récit biblique…

Voyons maintenant le récit du naufrage de l’apôtre Paul, selon deux points de vue : (1) celui des soldats et (2) celui de l’officier (nommé centenier dans les schémas). Mais d’abord, le texte.

Les soldats étaient d’avis de tuer les prisonniers, de peur que l’un d’eux ne s’échappe à la nage. Mais l’officier, qui voulait sauver Paul, les a empêchés de mettre ce projet à exécution. Il a ordonné à ceux qui savaient nager de se jeter les premiers à l’eau pour gagner la terre, et aux autres de s’agripper à des planches ou à des débris du bateau. C’est ainsi que tous sont parvenus sains et saufs à terre. (Actes 27.42-44, Segond 21)

 (1) « Leur vie ou la nôtre! » (point de vue des soldats)

Mise en contexte : À l’époque, un soldat romain qui perdait un prisonnier devait répondre de sa vie. C’est pour cette raison que, dans ce récit, ils cherchent à tuer les prisonniers plutôt que de les voir s’enfuir.

En bref…

Sujet = les soldats
Objet (ou objectif) des soldats = tuer les prisonniers (dont Paul)
Destinateur (qui les motive?) = la peur de mourir
Destinataire (qui en profitera?) = les soldats eux-mêmes
Opposant = l’officier (centenier)
Adjuvant (aidant) = rien ni personne

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(2)  « Tous doivent rester en vie! » (point de vue de l’officier)

Mise en contexte : Paul avait informé l’équipage que Dieu les protégerait tous, selon la vision qu’il avait eue (Actes 27.21-26). L’officier croit aux paroles de Paul.

En bref…

Sujet = l’officier (centenier)
Objet (ou objectif) de l’officier= sauver Paul
Destinataire (qui le motive?) = sa confiance (ou sa bonté, voire Dieu lui-même)
Destinataire (qui en profitera?) = Paul et les prisonniers
Opposant = aucun (les soldats obéissent aussitôt)
Adjuvant (aidant) = aucun (l’autorité du centenir suffit)

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Le récit du naufrage de Paul remplit les conditions du schéma actanciel pour deux sujets. Il arrive que certaines quêtes n’aient ni opposant, ni adjuvant, comme dans le deuxième exemple. Mais chaque action doit essentiellement remplir les autres conditions (avoir un destinateur et un destinataire) pour qu’on puisse la considérer comme une action réelle et utile à un récit. On peut les comparer à des signes vitaux qui déterminent si un être est vivant ou non.

Par conséquent, si un personnage dans une pièce pose une action qui n’a ni destinateur, ni destinataire et surtout ni objet, ce personnage est alors inutile et alourdit simplement la scène ou la pièce. On peut observer ce genre de situation dans les sketches où des personnages entrent sur scène sans but précis, sans raison évidente – si ce n’est celle qu’on voulait donner un rôle à Untel parce-qu’il-voulait-tellement-jouer-cette-fois-ci,  ou qu’on voulait faire rigoler l’auditoire…

Pour qu’une histoire soit bien bâtie, chaque personnage et chaque action doivent faire progresser l’histoire vers son superobjectif. Sinon, on distraira vainement le public, détournant même son attention de l’objectif réel.

Cigale ou fourmi?

Photo de David Higgins sur Unsplash.com
Par Chantal Bilodeau-Legendre

Bric et Brac sirotent une limonade au bord de la piscine. Une cigale chante à tue-tête.

Bric :    À quoi tu penses?

Brac :   À Noël.

Bric :    On est en juillet!

Brac :   Justement. Faut que je planifie le 25 décembre. Ou le 20, si ça se trouve.

Bric :    Le programme de Noël de l’église?

Brac :   Ouaip.

La cigale s’est tue. L’idée de Noël lui fait peur. La bise est-elle déjà venue? Devra-t-elle aller crier famine chez la fourmi sa voisine plus tôt que prévu? Il faut laisser passer l’été, tout de même!

Bric :    Et les vacances?

Brac :   J’en fais comme un projet de vacances… Sinon l’automne sera un cauchemar.

Bric :    Sans blague?

Brac :   Sans blague.

Un ange passe. Et quelques nuages moelleux dans le ciel azuré.

Brac :   Écoute, pour jouer le 20 décembre prochain, il faut que tout soit fin prêt au plus tard le 18 ou le 19.

Bric :    Pour la générale. Logique.

Brac :   Et si je commence les répétitions le 15 octobre, ça me donne à peine deux mois de préparation avec la troupe.

Bric :    Suffisant, non?

Brac :   Selon le nombre de répétitions par semaine, la durée de la pièce, le nombre de participants, etc. deux mois peuvent suffire… ou non.

Bric :    Donc, c’est possible que le 15 octobre soit un peu tard pour le début des travaux!

Brac :   Justement. Mais pour commencer à cette date, il faut que j’aie DÉJÀ choisi la pièce et mis en place la mise en scène. Ce ne sera pas le temps d’improviser à partir du 15 octobre!

Bric :    Ah! pour l’impro, moi, je m’y connais!

La cigale aussi. Elle entonne à ce moment un chant de son cru. L’originalité est absente: le chant semble familier…

Brac :   Je ne peux pas improviser ce genre de choses. Tu vois, à cette date, plein d’autres trucs doivent être DÉJÀ faits : le recrutement des comédiens, la formation d’une équipe technique

Bric :    Une équipe technique?

Brac :   Qui va faire les costumes? Qui va confectionner les accessoires? Car les accessoires doivent être prêts début novembre! Et les décors? Et si je décide que j’ai besoin de musique, de chants, de bruitage ou d’éclairage particulier? Je ne peux décemment pas faire ça tout seul!

Bric :    Ce serait indécent, oui.

Brac :   Doooooonc, pour commencer le 15 octobre avec les comédiens, il faut que l’aspect technique de la pièce soit DÉJÀ réglé – ou du moins presque. Je dois commencer à y penser…

Bric :    Le 1er du mois.

Brac :   Oh! Quinze jours, c’est trop peu! Je ne trouve pas toujours facilement les aides dont j’ai besoin, à l’église…

Bric :    Le Seigneur pourvoira…

La cigale opine du bonnet. Un merle s’envole avec un ver dodu dans le bec.

Brac :   Le Seigneur a toujours pourvu. Mais il m’a montré que je gagnais à faire preuve de prévoyance, un peu comme l’architecte et le roi*…

Bric :    Et la fourmi*, mettons.

Brac :   La fourmi? Tiens, je n’avais pas pensé à elle.

Bruyante interruption de la part de la cigale. Elle n’aime pas ce genre de discours.

Brac :   Je compte sur le Seigneur, mais au fil des ans il m’a montré que ce n’est pas le temps de commencer à penser au programme de Noël le 15 septembre.

Bric :    Et pourquoi pas? Un mois, c’est amplement…

Brac :   Septembre, c’est le retour à la « réalité » pour bien des gens – comme la rentrée scolaire pour la plupart de mes comédiens…

Bric :    Hmmmouais…

Brac :   Non, tu vois, juillet, c’est pour moi le temps de commencer à penser à Noël. En sirotant une limonade, par exemple. Et je ne paniquerai pas quand septembre approchera. J’aurai déjà accompli une bonne part du boulot. Je pourrai même modifier des choses sans m’affoler si des imprévus surgissent!

Comme pour appuyer cette dernière tirade, quelques merles, groupés au parterre, se mettent à parler tous en même temps, sans égard aux lamentations de notre pauvre cigale.

Bric :    Une autre limonade?

Brac :   Bien sûr! Avec de la grenadine… Le rouge, c’est une couleur de Noël, non?


* Jésus parle de l’architecte et du roi en Luc 14.28-32. Le roi Salomon mentionne la fourmi en Proverbes 6.6.

L’étude avant le jeu…

Par Chantal Bilodeau-Legendre

Photo de Green Chameleon sur Unsplash.com

Pour la plupart des comédiens, le JEU est l’aspect le plus intéressant du théâtre – le plus amusant, aussi!  Improvisation, exercices de théâtre, travail de scène, voilà autant d’activités où les habiletés naturelles ou acquises de chacun et chacune sont le plus mises à profit.

Cependant, il arrive trop souvent qu’on néglige un aspect important de l’activité théâtrale : l’étude du personnage. Rares sont les enfants qui préfèrent l’étude au jeu… Et peu nombreux sont les comédiens amateurs qui étudient leur personnage à fond avant de jouer!

Pourtant, l’étude du personnage est essentielle au jeu crédible. Si nous voulons « accrocher » le public par notre interprétation, si nous désirons qu’il s’identifie à notre personnage, il faut d’abord nous approprier ce personnage. Et nous ne pourrons pas jouer un rôle avec profondeur et sensibilité si nous nous limitons aux mots du texte. Il faut aller plus loin, creuser le script… et inventer au besoin pour combler de façon réaliste ce que le texte ne nous révèle pas.

Lorsque vous commencez à étudier un rôle, vous devez d’abord rassembler tous les matériaux qui s’y rapportent. Ensuite, vous les compléterez par l’imagination, jusqu’à ce que vous ayez réalisé une telle ressemblance avec la vie qu’il vous soit facile de croire en ce que vous faites.  (Constantin Stanislavski, La formation de l’acteur, chapitre 3)

L’approche de Stanislavski est celle que nous prônons dans les pages de notre site. Pour vous aider à l’appliquer, Lorraine vous suggère un questionnaire dans l’article L’étude du personnage de la rubrique Interprétation. Elle propose aussi dans l’article Bio d’un personnage : cinq sens  une grille analytique qui permet de forger une « biographie » crédible d’un personnage fictif à partir des cinq sens. Inventer une bio s’avère toujours un exercice utile pour créer des personnages « de chair et d’os ».

Et vous savez… l’étude avant le jeu, ça peut facilement devenir un jeu créatif amusant!


Suggestion de lecture La formation de l’acteur, par Constantin Stanislavski (1863-1938), créateur du Théâtre d’Art de Moscou. « Ce livre, ce Grand Livre, est une reconsidération totale de l’acteur. [L’auteur] dépouille […] l’interprète de ses vanités. Il le dévêt de ses clinquants. Il analyse sans pitié ses faux prestiges. Il détruit absolument le culot et son cousin, le cabotinage » (Jean Vilar, dans l’introduction de l’ouvrage). Un classique sur l’art du comédien, publié aux Éditions Payot.

Passera, passera pas?

 

« Après la pièce, j’ai demandé à des amis de me raconter l’histoire. C’est drôle, on dirait qu’ils n’ont rien compris. » – Drôle… ou tragique? 

Nous avions un message du tonnerre et les bonnes idées fusaient de partout. Nous étions sûrs de la direction de Dieu. Toute l’église nous appuyait. Le projet sentait la réussite à plein nez. Et pourtant, malgré tout l’enthousiasme et la bonne volonté du groupe, les amis n’ont rien compris à l’histoire. Que s’est-il passé? 

Au fil de la préparation d’une pièce, des forces déviatrices peuvent s’exercer. Elles risquent de détourner notre flèche de sa trajectoire. (Voir l’article sur la Le superobjectif et ligne d’action principale) Un peu à gauche, un peu au-dessus, et voilà la cible manquée. Manquée de peu, peut-être, mais manquée tout de même.

Photo de Engin Akyurt sur Unsplash.com

Voici quelques-unes de ces forces déviatrices ainsi que des pistes de solution pour vous assurer que le message de votre pièce atteint sa cible.

Texte confus

Cela va de soi: le texte de la pièce constitue un facteur déterminant pour la réussite du projet. Un texte mal bâti engendre la confusion dans l’esprit des spectateurs.

♦ Les idées sont désordonnées, sans suite logique.

♦ On n’y distingue pas la structure : introduction – nœud – dénouement.

♦ On n’y voit pas de ligne directrice.

♦ Un trop grand nombre de personnages interviennent sans raison.

♦ Quelques scènes hors contexte amènent notre attention ailleurs.

♦ Trop de tableaux rompent l’enchaînement des scènes.

Faites ce petit test : Racontez d’abord l’histoire à un ami. Si vous avez l’impression de tourner en rond, si vous devez passer par le sud pour vous rendre au nord, il s’agit probablement d’une histoire confuse.

Piste de solution. Si vous avez en mains un texte confus, changez de pièce! Mais parfois, les faiblesses d’un texte ne sont pas terribles : vous pourriez les rectifier, avec la permission de l’auteur. Quelques coupures et ajouts suffiront peut-être à offrir une histoire plus claire.  Et puis, jetez un coup d’oeil à notre dossier Écriture.

Absence d’un message central

Une pièce peut contenir une foule d’idées intéressantes, sans pour autant contenir de message central. Que veut-on communiquer, au juste? Supposons que notre cœur déborde de vouloir dire au spectateur que Dieu l’aime, que le sacrifice de Jésus suffit pour le sauver, que la Bible est la seule autorité du croyant, que la théorie de l’évolution ne tient pas, que Dieu désire guérir ses souffrances, qu’il ne sert à rien de prier les idoles et que la foi déplace des montagnes. Ouf! Dites-moi franchement : Croyez-vous que le spectateur réussira à réfléchir tous ces sujets à la fois?

Piste de solution. Si la pièce est ainsi construite, trouvez-en une autre. Il est important que les personnages progressent vers un seul dénouement, offrant aux spectateurs matière à réflexion. Prenez le temps d’explorer nos pièces!

Grand nombre de distractions

Le texte de la pièce a fait l’objet d’une analyse détaillée. Verdict : il est clair et ne comporte qu’un seul message central. Merveilleux! Nous l’entreprenons. Durant la représentation, certains spectateurs se grattent la tête, observant leurs voisins pour voir s’ils sont les seuls à perdre le fil de l’histoire… Qu’est-ce qui a bien pu les distraire?

♦ Les effets techniques l’emportent sur le jeu des comédiens ou sont difficiles à saisir.

♦ Les jeux d’éclairage sont prétentieux.

♦ Les pièces musicales coupent le fil de l’histoire.

♦ Le diaporama présente des images floues.

♦ La scène est mal éclairée.

♦ Les comédiens offrent une mauvaise élocution et leur jeu dramatique n’est pas sincère.

Piste de solution.  Durant la préparation de la pièce, assurez-vous que tous les détails mis en place sont justifiés, autant les effets techniques que les jeux de scène des comédiens. Le jeu d’éclairage n’existe pas pour susciter l’admiration mais pour rehausser l’émotion du personnage. La musique ne sert pas à assourdir le public mais à l’inviter à la réflexion. Un effet technique réussi ne se fait pas remarquer : il s’insère tout doucement dans l’histoire. Il est comme le bon sel, il rehausse simplement la saveur. (Connaissez-vous les 14 langages de théâtre?)

Le comédien se fait valoir

On peut manquer la cible lorsqu’un comédien fait des drôleries pour attirer toute l’attention sur lui. Au lieu de repartir avec le message bien en tête, le spectateur sortira en disant : « Comme il était drôle ce garçon! » Et on est passé à côté!

Piste de solution. Si le metteur en scène remarque qu’un comédien cherche à cabotiner durant les répétitions, il doit l’en aviser et redresser la situation. Il devrait d’ailleurs aborder la question du cabotinage à diverses occasions durant le projet, et insister sur la générosité et l’humilité dont chacun et chacune devrait faire preuve.

Objectifs personnels qui dévient

Comédien, metteur en scène ou technicien, nous avons des objectifs personnels en tête. Certains sont parfois très bons, mais d’autres s’écartent de l’objectif principal.

♦  «On a déniché un méga système d’éclairage pour 100 $. On se demandait quoi faire avec. Pourquoi ne pas monter une pièce de théâtre? »

♦  « On a une excellente chorale et plusieurs chants sont déjà prêts. On pourrait peut-être les inclure dans votre spectacle?»

♦  « Le théâtre, j’ai ça dans le sang! Partout où je passe, les gens se tordent de rire. Je suis sûr qu’une bonne blague bien placée, ça va réveiller votre monde. »

♦  « Ben, c’est que mon meilleur ami est dans votre groupe. J’ai décidé d’embarquer moi aussi. »

Piste de solution. Usez de discernement lorsque des personnes enthousiastes, créatives et bien intentionnées font des propositions pour concocter un spectacle ou « rehausser » une pièce. Curieusement, ce sont souvent les idées les plus attrayantes qui nous font dévier! N’acceptez pas d’emblée tout ce que l’on vous suggère. Prenez le temps d’y réfléchir et de bien le considérer. Dire non avec tact et douceur, en expliquant clairement les motifs de ce « non », est un art qui s’apprend. Certes, vous risquez de décevoir des gens, mais vous devez vous rappeler dans quel but et pour qui vous faites du théâtre.

Et si le message passait?

Tous les choix du metteur en scène doivent être justifiés. Pour être en mesure de passer un bon message par le théâtre, il doit comprendre ce qui appuie le message et ce qui l’en détourne. Laissons le spectateur partir avec une seule idée en tête, celle du message qui vient de traverser son cœur.

Bien entendu, tous les projets de théâtre ne seront pas parfaits, il y aura des erreurs de parcours. Reconnaître les forces déviatrices ne s’apprend pas du jour au lendemain! Mais il faut aller de progrès en progrès à cet égard, sans se décourager, en comptant sur le grand Metteur en scène pour nous guider dans notre travail!

Lorraine