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Mémoire affective et Méthode avec un grand M

Par Chantal Bilodeau-Legendre

La mémoire affective

Les jeunes tirent au hasard des bouts de papier sur lesquels l’animateur a écrit diverses émotions. Ils doivent les exprimer comme ça, à brûle-pourpoint. Joie. Inquiétude. Colère. Jalousie. Tristesse. Leur jeu fait très « cliché » : on se ronge les ongles frénétiquement, on saute sur place, on croise les bras l’air boudeur, on se contorsionne le visage pour simuler des pleurs. Ouf. Il y a de tout là-dedans – sauf de l’émotion.

Bon, ça va pour les exercices de théâtre – mais on ne peut décemment pas jouer « pour de vrai » en public en exprimant des caricatures d’émotions, surtout quand la pièce est tout sauf une parodie!

Comment reproduire des émotions qui viennent « d’en dedans », des tripes? Comment ne pas se limiter à une sorte de masque grotesque plaqué sur le visage? Comment être si crédible qu’on émouvra le spectateur au point de même lui arracher des larmes?

Il y a quelques décennies, Constantin Stanislavski a répondu à ces questions en développant la notion de mémoire affective et en élaborant sa fameuse « méthode ». Cette méthode a fait école, si bien qu’on parle encore aujourd’hui de LA Méthode, avec un grand M.

Lisez à ce sujet l’article de Lorraine : La mémoire affective et la Méthode.

Et si vous voulez en savoir davantage sur M. Stanislavski, allez jeter un coup d’oeil sur Wikipedia, ou bien lisez son célèbre ouvrage, La formation de l’acteur, aux Éditions Payot. Un classique.

Deux feux?

Par Chantal Bilodeau-Legendre

Photo de Maxim Tajer sur Unsplash.com

Cette comédienne a le feu sacré, entend-on parfois. Par ces mots, on désigne la passion intérieure, l’enthousiasme, l’inspiration qui l’animent. Avoir le « feu sacré » en théâtre est souvent très exaltant – on joue comme habité par son personnage, porté par un élan, et c’est « magique » chaque fois qu’on monte sur les planches.

Le théâtre avait cet effet « magique » sur moi à l’adolescence. Cependant, lorsque j’ai embrassé la foi chrétienne, un autre feu s’est allumé dans mon cœur. Après un certain temps, je me suis rendu compte que je ne pouvais pas entretenir deux feux en même temps. Inévitablement, l’un des deux allait être négligé… et je craignais, si je poursuivais des études exclusivement en théâtre, d’être poussée à faire des compromis avec mes valeurs nouvelles.

Parvenue à un carrefour dans mes études, j’ai opté pour une profession plus « sérieuse » (la traduction) en me disant que, diplôme en poche, j’allais pouvoir quand même faire du théâtre comme un à-côté. Avec les années, j’ai découvert que je pouvais vraiment faire du théâtre, sans faire de compromis avec ma foi. Mais au début, dans mon petit patelin, j’étais plutôt isolée et à court de moyens…

Je suis certaine de ne pas être la seule à avoir vécu une telle situation. Encore aujourd’hui, d’autres vivent un dilemme semblable: comment assujettir ses talents à ses convictions? Je crois que nombreux sont les croyants qui, animés d’un feu pour le Seigneur, brûlent de l’exprimer par le moyen du théâtre – ou par toute autre forme d’expression artistique (mime, manipulation de marionnettes, danse, etc.).

Lorraine et moi espérons que les nombreuses ressources offertes gratuitement sur notre site contribueront à l’avancement de l’art dramatique (et de l’écriture) dans le monde évangélique. Qu’elles seront pour vous une importante source d’inspiration.

Si vous avez des témoignages, n’hésitez pas à nous écrire à theatre.evangelique@gmail.com pour nous les partager. Que le Seigneur vous rende féconds à son service!

L’étude avant le jeu…

Par Chantal Bilodeau-Legendre

Photo de Green Chameleon sur Unsplash.com

Pour la plupart des comédiens, le JEU est l’aspect le plus intéressant du théâtre – le plus amusant, aussi!  Improvisation, exercices de théâtre, travail de scène, voilà autant d’activités où les habiletés naturelles ou acquises de chacun et chacune sont le plus mises à profit.

Cependant, il arrive trop souvent qu’on néglige un aspect important de l’activité théâtrale : l’étude du personnage. Rares sont les enfants qui préfèrent l’étude au jeu… Et peu nombreux sont les comédiens amateurs qui étudient leur personnage à fond avant de jouer!

Pourtant, l’étude du personnage est essentielle au jeu crédible. Si nous voulons « accrocher » le public par notre interprétation, si nous désirons qu’il s’identifie à notre personnage, il faut d’abord nous approprier ce personnage. Et nous ne pourrons pas jouer un rôle avec profondeur et sensibilité si nous nous limitons aux mots du texte. Il faut aller plus loin, creuser le script… et inventer au besoin pour combler de façon réaliste ce que le texte ne nous révèle pas.

Lorsque vous commencez à étudier un rôle, vous devez d’abord rassembler tous les matériaux qui s’y rapportent. Ensuite, vous les compléterez par l’imagination, jusqu’à ce que vous ayez réalisé une telle ressemblance avec la vie qu’il vous soit facile de croire en ce que vous faites.  (Constantin Stanislavski, La formation de l’acteur, chapitre 3)

L’approche de Stanislavski est celle que nous prônons dans les pages de notre site. Pour vous aider à l’appliquer, Lorraine vous suggère un questionnaire dans l’article L’étude du personnage de la rubrique Interprétation. Elle propose aussi dans l’article Bio d’un personnage : cinq sens  une grille analytique qui permet de forger une « biographie » crédible d’un personnage fictif à partir des cinq sens. Inventer une bio s’avère toujours un exercice utile pour créer des personnages « de chair et d’os ».

Et vous savez… l’étude avant le jeu, ça peut facilement devenir un jeu créatif amusant!


Suggestion de lecture La formation de l’acteur, par Constantin Stanislavski (1863-1938), créateur du Théâtre d’Art de Moscou. « Ce livre, ce Grand Livre, est une reconsidération totale de l’acteur. [L’auteur] dépouille […] l’interprète de ses vanités. Il le dévêt de ses clinquants. Il analyse sans pitié ses faux prestiges. Il détruit absolument le culot et son cousin, le cabotinage » (Jean Vilar, dans l’introduction de l’ouvrage). Un classique sur l’art du comédien, publié aux Éditions Payot.

L’intrigue

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Que vous souhaitiez écrire une histoire (sous forme de pièce ou autre), ou que vous désiriez « décortiquer » un récit pour mieux comprendre l’enchaînement de ses éléments, il est important de connaître la structure de l’intrigue.

(Et si le coeur vous en dit, jetez aussi un coup d’oeil à notre dossier Écriture!)

Une explication

Mais d’abord, qu’est-ce qu’une intrigue? Tout simplement, une suite d’actions unifiées par un thème. En voici une description très sommaire.

On commence par une situation initiale – comme si on plaçait des pions sur un échiquier. Cette partie est souvent de courte durée. Un événement déclencheur surgit, prétexte à l’action, et vient perturber l’équilibre du début. À cet événement en succède un autre, puis un autre… Ce sont les péripéties, qui constituent la plus grande partie de l’histoire, son « nœud ». Elles consistent en rebondissements, en conflits qu’on tente de régler, etc. Les péripéties s’enchaînent en un crescendo et finissent par atteindre un point fort (ou climax), qui correspond au moment de la pièce où l’émotion est la plus intense, d’habitude juste avant la fin. Ensuite, le dénouement présente la résolution de tous les conflits. C’est là que, d’habitude, les méchants sont punis et les gentils récompensés. Cette partie de l’intrigue devrait fournir aux spectateurs des réponses satisfaisantes à leurs questions. Elle ne dure pas très longtemps. Enfin, une dernière partie, plus courte encore, expose la situation finale : l’histoire se termine par un nouvel équilibre, retrouvé après toutes les péripéties et leur dénouement (Lucky Luke s’éloignant dans le soleil couchant, ou le ils-vécurent-heureux-et-eurent-beaucoup-d’enfants des contes).

Une illustration

Situation de départ

Il était une fois, dans un royaume fort éloigné, une jolie princesse… (Qui? Quoi? Où? Quand?)

Événement déclencheur

Un jour, la vilaine reine se rendit compte que… (Sans événement pour déclencher l’action… eh bien, il n’y a pas vraiment d’histoire!)

Péripéties

Alors la vilaine reine tendit un piège… Mais la princesse… Alors la reine se déguisa et… Heureusement, la marraine… Furieuse, la reine prit les grands moyens et… Alors, un valeureux jeune homme… (Et ainsi de suite, en un crescendo insoutenable.)

Point fort

Lorsque la reine ordonna à son dragon de calciner la princesse ligotée, le valeureux jeune homme, plus vif que l’éclair… (Apogée du crescendo)

Dénouement

Le valeureux jeune homme (qui était un prince déguisé) débarrassa le royaume de la vilaine reine. Celle-ci fut contrainte à laver les chemises de l’archiduchesse à perpétuité. (Bien fait pour elle!)

Situation finale

Le prince épousa la princesse, et ensemble ils gouvernèrent le royaume avec beaucoup de sagesse pendant très longtemps. (On essuie une larme. Tout est bien qui finit bien.)

Attention!

Il arrive qu’une histoire commence par la fin… On fait alors un retour en arrière, puis on revient dans le présent. Il existe en effet diverses façons de développer une intrigue. Nous vous avons présenté la façon traditionnelle.

Exercices

♦ Lisez une histoire et identifiez-en les divers éléments. (Vous pouvez faire la même chose à partir d’un film, d’un épisode de feuilleton télévisé, d’une émission pour enfants, etc.)

♦ Inventez une histoire en suivant la succession des éléments de l’intrigue. Commencez par quelque chose de très simple, pour le raconter à de jeunes enfants par exemple.

L’équipe TE

L’étude du personnage

Par Lorraine Hamilton

theatre-51Pourquoi étudier son personnage?

L’étude de personnage permet de dresser un portrait du personnage à interpréter. Il faut en effet lui créer une personnalité (qualités, défauts, manies, tics, etc.), lui prêter une voix, un aspect général, un style – bref une « vie », qui n’est pas décrite explicitement dans le texte de la pièce, mais qui déterminera la façon de le jouer. De plus, il faut aussi comprendre quelle place le personnage occupe dans la pièce, quel est son rapport avec les autres. Pour ce faire, l’élaboration d’un questionnaire s’avère fort utile.

Au début de la préparation d’une pièce, le metteur en scène remet à chacun et chacune la copie d’un questionnaire d’étude (voir plus bas).  Les comédiens doivent y répondre selon les indices fournis dans le texte de la pièce. Si ce dernier ne donne pas d’indice, les comédiens peuvent déduire ou inventer des réponses qui sont en harmonie avec les révélations du texte. L’étude d’un personnage n’est pas définitive, mais évolutive. Au fil des répétitions, les comédiens cernent davantage leur rôle. Ils en arrivent à mieux comprendre leur personnage, et ainsi peuvent raffiner le portrait qu’ils en font.

Négliger l’étude de son personnage

Si le personnage est mal connu du comédien lui-même, les spectateurs auront du mal à le cerner et à comprendre ses interventions. Le comédien le jouera sans conviction, le rendant ainsi peu crédible. En en faisant l’étude, il ajoutera de la véracité à son jeu.

Si le comédien ne connaît pas bien la personnalité de son personnage et qu’il a un blanc de mémoire, il aura du mal à improviser intelligemment. Il risque de décrocher de son rôle en lançant des phrases creuses. Par contre, grâce à une bonne étude, il pourra improviser selon le caractère de son personnage. Sa maîtrise et son assurance seront évidentes, et il est fort probable que les spectateurs n’y voient que du feu.

Exemple de questionnaire

Voici plusieurs questions qui facilitent l’étude d’un personnage. Bien entendu, elles s’adressent au personnage à interpréter, et non au comédien lui-même! Libre à vous de les adapter à vos besoins.( Vous pouvez télécharger un document plus bas.)

  • Comment t’appelles-tu (nom et prénom)?
  • Quel âge as-tu?
  • Quelle est ta nationalité?
  • Qui sont tes amis?
  • Qu’aimes-tu faire durant les week-ends?
  • Quelle est ta musique préférée?
  • Quelles sont tes lectures préférées?
  • Quel est ton sport préféré?
  • Quels sont tes passe-temps?
  • Quelles sont tes qualités?
  • Quels sont tes défauts?
  • Es-tu un leader ou un suiveur?
  • Es-tu introverti ou extraverti?
  • As-tu un tic, une manie?
  • Quel est le timbre de ta voix?
  • Quel est ton débit quand tu parles?
  • Quel est le rythme de tes gestes : lent, rapide, saccadé?
  • Décris ta relation avec les autres personnages de la pièce.
  • Quel est ton but dans cette pièce?

Téléchargez ici ce questionnaire d’étude de personnage .